Bienvenue sur le blog de l'association loi 1901 Objectif Mada - Tanjona Mada

Voici le blog sur lequel après avoir pu suivre jour après jour le périple de Simon et Stéphanie à Madagascar, vous pouvez suivre les réalisations d'Objectif Mada.

mardi 2 novembre 2010

Newsletter n°2

Newsletter n°2, 17 octobre 2010 : De Tana à Diégo…

Bonjour à tous et merci de continuer à suivre notre aventure. Voilà maintenant près de deux semaines que nous avons quitté la capitale de la Grande Ile Rouge (Antananarivo) pour Diégo-Suarez (Antsiranana). Encore une fois, cette newsletter ne peut qu’être un bref résumé de toutes nos découvertes, on vous en dira probablement plus à notre retour.
Nous avons choisi de faire le trajet en taxi-brousse, sorte d’antique mini-bus bondé et puant, pour des questions de coût mais aussi pour vivre au plus près de la population malgache. Par ailleurs, le taxi-brousse est tellement typique qu’il serait presque, à notre avis, une erreur de ne pas l’essayer au moins une fois. Cependant, nous ne sommes pas près de l’oublier. Avec près de 30 heures de voyage sans arrêt (à part les pauses pipi en pleine brousse et les arrêts pour déposer les gens tout le long du chemin)et 32h sans manger le moindre peu bout (nous avions prévu du chocolat mais il a fondu…) le taxi-brousse fut un grand moment en lui-même! Et ironiquement parlant, on était pas du tout serré, on avait pas du tout chaud… Enfin, c’était malgré tout une aventure à vivre. Stéphanie aurait cependant préféré avoir une place assise, parce que 28h assise sur le fer entre deux strapontins, ce n’est pas très confortable… Elle en pleurait presque.
Diégo-Suarez est une ancienne ville coloniale, qui était française avant le reste de La Grande Ile et qui est restée longtemps sous gestion militaire française bien après la décolonisation. Son statut est donc un peu particulier. Il y a beaucoup de militaires français qui y sont restés, et beaucoup de vasahas qui s’y sont installés par la suite. Aujourd’hui encore, ils sont près de 20 000 résidents étrangers. Diégo est par ailleurs assez touristique (notamment grâce à la magnifique baie de Diégo qui va jusqu’à l’océan indien), et il y a peu d’insécurité. Les blancs ont donc plus tendance à marcher qu’à prendre un taxi et il n’est pas rare d’en croiser dans la rue, sur la plage ou au marché, ce qui contraste fortement avec Tana. Cette ville au passé glorieux garde de nombreuses traces de sa riche architecture, même si aujourd’hui les cyclones et le manque d’entretien l’ont un peu transformée en ville fantôme par endroits. Les paysages alentours sont aussi somptueux, avec les 3 baies, la mer d’Emeraude (complètement transparente) ou le petit village de pêcheurs de Ramena. Hormis l’alliance française, il n’y a pas d’activités culturelles importantes, ni de cinéma (le dernier cinéma du pays, le Rex de Tana, a fermé il y a plusieurs années). C’est ce qui explique la présence de très nombreux restaurants, boostés par l’afflux touristique. En arrivant ici en taxi-brousse, on a vraiment l’impression d’être dans un autre univers… Ce n’est pas la même ambiance, pas le même peuple, pas la même végétation… Mais c’est toujours Madagascar.
Très étendue, la ville ressemble à une sorte de gigantesque village et on réalise très vite que le taux de pauvreté n’est pas le même qu’à la capitale. Ici, on peut facilement vivre du tourisme, de la pêche et de la culture. Un phénomène est à noter cependant : l’omniprésence des taxis jaunes : des 4L aux 3 roues, la profession a été victime de son succès, et ils sont aujourd’hui en surnombre…
On remarque aussi la présence de nombreux « conducteurs » de pousse-pousses qui transportent (avec beaucoup de mérite) des matériaux la journée et qui font office de ramassage scolaire (avec 6 ou 7 écoliers par pousse-pousse !) en début et fin de journée. La nuit, la plupart sont gardien, ils ne dorment donc jamais dans un lit !
Diégo a aussi un port de marchandise, plus petit que celui de Tamatave, mais qui reste assez important malgré tout.
De part la présence de nombreux vasahas, même si la population est moins pauvre, il y a un réel décalage entre les « colons » et la population locale puisque certains vivent avec une retraite française ou un salaire élevé.
Malgré tout, beaucoup d’associations humanitaires ont été créées.
Il y a l’association pour les enfants de l’école maternelle de Ramena, qui récolte des fonds pour ouvrir une nouvelle école. Il y a « Cœur et conscience » qui développe l’éducation à Diégo, « Coup de pouce » ou encore le « Lions Club » qui aide au développement de la ville et finance des projets de toute sorte.
Il y a encore l’Alliance Française. Créée à échelon international, l’alliance française existe depuis de nombreuses années. Il y a un organisme principal à Tana et des antennes un peu partout dans le pays, dont une à Diégo. L’alliance française est un organisme culturel proposant des cours de français, d’anglais, de malgache et d’espagnol de tous niveaux, mais aussi une bibliothèque avec des prêts de livres et des expositions et activités culturels (ateliers d’écriture, de lecture…) de toutes sortes. Le bureau principal de l’alliance se situe à Paris.

La gestion des déchets
C’est un des problèmes majeurs de la ville de Diégo, et plus généralement de Madagascar. Comme à Tana, ici il n’y a aucun traitement des déchets. Pas de poubelles, pas de recyclage, pas même un seul incinérateur dans tout le pays. Seulement des bennes à ordures éparpillées ça et là, ramassés à l’occasion, quand le budget municipal le permet ou quand les élections s’approchent. Et un terrain vague à la périphérie de la ville qui fait office de décharge et auquel on met le feu de temps en temps pour faire de la place sur le tas. Pas même de clôture à ce grand champ et les malgaches, avides de modernité, se sont depuis longtemps mis aux sacs plastiques. Ceux-ci, bien qu’aujourd’hui bannis des caisses de supermarché en Europe, ont la vie belle à Madagascar. Le vent aidant, ils n’ont aucune difficulté pour s’envoler à tout va. Les arbres, à Diégo comme ailleurs, sont ainsi couverts de milliers de guirlandes plastiques de toutes les couleurs…
Si des programmes de recyclage ont été mis en place dans certains pays pauvres, débarrassant les villes de leurs ordures et octroyant du même fait un revenu non négligeable aux « soldats de la propreté » qui ramassent, trient et revendent les ordures, rien de tel n’existe encore à Madagascar. Les populations qui pourraient bénéficier de tels programmes se désintéressent pour la plupart complètement de ces problèmes là. Malheureusement, il y a encore beaucoup à faire pour faire émerger ici une conscience environnementale.
Les décharges publiques sont néanmoins fouillées par les plus pauvres parmi les pauvres. Pas de quoi en faire une activité décente cependant : les bouchons de bouteilles plastiques sont ainsi revendus autour d’un centime d’euros le kilo…
Si ce problème d’ordures jonchant les rues est donc un problème général à Madagascar, il n’en reste pas moins que Diégo-Suarez reste quand même bien plus propre que Tana.

Le travail des enfants
En Afrique de l’ouest, le travail des enfants (et même l’esclavage des enfants) est fréquent. Les enfants soldats en sont l’illustration la plus extrême. Il arrive que même lorsque les enfants sont scolarisés (comme nous le disait une amie qui œuvre au Togo) ceux-ci soient utilisés par leur propre instituteur, durant les temps d’école, pour des travaux ménagers ou des choses plus dramatiques encore. De tous les témoignages qu’on ait pu recueillir (résidents, instituteurs, parents, …) cela n’existe pas à Madagascar. La majorité des enfants sont scolarisés, et lorsqu’ils sont scolarisés, ils le sont vraiment : ils ne sont pas sortis de l’école par leur propre instituteur. Cela n’empêche pas les enfants d’accomplir de menus travaux avant ou après l’école pour gagner un peu d’argent (jardinage, ménage,…) mais cela ne les empêche généralement pas de poursuivre normalement leur scolarité.
Si « la majorité des enfants sont scolarisés », cela signifie néanmoins qu’ils ne le sont pas tous. En ville, de larges affiches de propagande titrant « Carton route au travail des enfants » sont là pour nous le rappeler. La société malgache repose sur une stratification sociale et un système de castes (très proche du système de castes indien) avec les descendants de roi à un bout de l’échelle et les descendants d’esclaves à l’autre bout. Ces derniers sont en général très mal considérés par la haute société malgache (et par certains vasahas), vivent de petits boulots et n’ont généralement pas suffisamment d’argent pour la scolarisation des enfants (bien que l’école publique soit gratuite à Madagascar, mais il y a toujours des frais de rentrée, comme en France). Même lorsque, à force de travail, une famille issue d’une petite caste parvient à scolariser ses enfants, elle devra choisir certaines écoles plutôt que d’autres, et surtout pas d’école privée : si les enfants de la femme de ménage se retrouvaient dans la même école que ceux de ses patrons, elle devrait les retirer immédiatement sous peine de perdre son emploi !
Les enfants issus de ces petites castes ne sont donc pas toujours scolarisés. Ils sont alors généralement employés comme bonnes à tout faire (pour les petites filles) ou pour les travaux des champs (pour les petits garçons)…
Autre problème : les enfants des rues. Il s’agit d’enfants livrés à eux-mêmes, orphelins ou dont la famille ne s’occupe pas. Ceux-ci ne vivent que de petits boulots et de menus larcins. Ils ne sont bien évidemment pas scolarisés, même si l’ONG « Graine de bitume », très active sur ce point, œuvre pour la réinsertion scolaire ou professionnelle de ces enfants.
La situation des enfants reste donc un problème à Madagascar.

Ramena
Petit village de pêcheurs, Ramena (on ne prononce pas le « a » final) est devenu la plage de Diégo, situé à une quinzaine de kilomètres. Pour aller à Ramena, on emprunte une petite route pittoresque, où il n’est pas rare de faire la rencontre de zébus ou de poules en liberté. Sur le côté droit, de magnifiques Baobabs se dressent fièrement (on réalise alors que le baobab, par sa puissance, sa grandeur et sa beauté, n’a décidément rien de commun avec les autres arbres) tandis qu’à gauche, au loin, on aperçoit la baie de Diégo et son fameux Pain de sucre, un pic rocheux abrupt qui semble posé là par erreur, entouré d’eau, magnifique au coucher de soleil (la petite ile qu’il forme est fady, interdite d’accès, pour des raisons religieuses).
Au port de Ramena, on fait aisément la différence entre les bateaux de touristes ou des vasahas et ceux des pêcheurs. Ces derniers utilisent des boutres, de petits bateaux artisanaux tout en bois, équipés d’un mât et d’une voile libre, attachée en haut du mât et à l’avant du bateau. Le petit moteur à essence sert aux manœuvres d’approche. C’est avec ce type de bateau que nous sommes partis à la mer d’émeraude. C’est vraiment sympathique et les paysages sont absolument magnifique…C’était une super journée, si on oublie que notre mât s’est cassé (!), et qu’on est ensuite tombés en panne d’essence…
La mer d’Emeraude est à l’extérieur de la baie de Diégo, en remontant vers le nord. Depuis Ramena, il faut compter une heure en boutre, mais le résultat est spectaculaire ! Nous découvrons une eau d’une couleur particulière et d’une transparence impressionnante. Pour un peu, on aurait vraiment l’impression d’être les figurants d’une revue en papier glacé…
De l’autre côté de Ramena, directement sur l’océan indien, il y a les 3 baies dont la baie de Sakalava où l’on retrouve de nombreux kite-surfeurs et où l’on constate que cet endroit de Madagascar est quand même très touristique par rapport à Tana. Il y a également la baie des pigeons, plus ou moins désertique et qui, elle, rappelle par endroits les paysages dénudés d’Irlande, ailleurs le maquis Corse ! Et enfin, la baie des Dunes, d’où l’on aperçoit d’ailleurs vaguement, au large, la mer d’Emeraude.

Joffreville et la Montagne d’Ambre
A une trentaine de kilomètres de Diégo se trouve la petite ville de Joffreville. A l’époque coloniale, cet endroit était le lieu de repos des militaires en faction à Diégo, car elle bénéficie d’un climat doux et pluvieux de par son altitude élevée, bien plus reposant que la chaleur suffocante du bord de mer. A quinze minutes de là, après une piste assez sportive, on se retrouve devant l’entrée du parc national de la montagne d’Ambre, géré par l’Angap (Association Nationale pour la Gestion des Aires Protégées), en collaboration avec le WWF. Pour visiter le parc, il nous faut impérativement un guide, ce qui permet d’éviter les abus, d’assurer un certain contrôle et de faire travailler la population locale. La réserve s’offre alors à nous, du long de ses 18200 ha, jusqu’à son sommet culminant à 1475 m. Tout ici, ou presque, est endémique : chaque arbre, chaque plante, chaque animal sur lequel l’œil s’attarde est une espèce propre à Madagascar, et ne vit nulle part ailleurs. Certaines ne vivent même qu’à la Montagne d’Ambre. Sur les 11 espèces de caméléons vivant ici, nous en verrons deux, dont le plus petit du monde (à peine 2 cm !). Il faut dire que Madagascar recueille plus de la moitié des caméléons du monde… Nous croiserons aussi deux espèces de lémuriens (dont le fameux Fulvus sanford), des mangoustes, des orchidées à en perdre la tête, et des centaines d’espèces endémiques de plantes carnivores, de champignons, lianes et plantes médicinales. Ici, un figuier étrangleur (Ficus rubra), là un martin pêcheur ; ici une magnifique cascade sacrée (il y en a trois dans le parc, que nous verrons toutes les trois), là une datura, du yucca, un pandanus, une framboise sauvage, Canarium madagascariensis, Cana indica ou un joli petit oiseau, « ouli-ouli ».
Nous nous attardons 5h dans ce parc à l’occasion d’une randonnée et décidément, à chaque nouveau pas, nous ne pouvons que constater que l’endémisme est partout. Dépaysement garanti !!

Le lac sacré
Plus loin dans les terres, près d’Anivorano Nord, il y a le lac sacré. Selon une légende, un sorcier aurait puni un village pour sa méchanceté et son manque d’accueil et les aurait tous transformés en crocodiles excepté une femme qui lui avait, elle, donnée de l’eau. Aujourd’hui, c’est un beau lac infesté de crocodiles et qui attire les touristes notamment les jours de sacrifice et de rituels. On a vu deux bébés crocodiles, la maman ne devait pas être loin mais elle se cachait.

Le nord de Madagascar est donc haut en couleur et totalement différent de la capitale de par son climat, son paysage et sa population. De ce fait, nous avons choisi de faire volontairement une newsletter très carte postale, non exempte cependant de quelques réflexions.
Nous vous retrouverons très prochainement pour une nouvelle lettre.
Les nouvelles photos ont été rajoutées sur le site internet de l’association, toujours ici :
http://objectifmada.free.fr/visionneuse/web/index.html
Nous atteignons la capacité maximale donc nous ne pouvons malheureusement pas partager avec vous toutes nos photos. Les autres le seront donc sous forme d’exposé, à notre retour en France, comme prévu.
A bientôt.
Simon et Stéphanie